Un peu avant Noël, Maman Chérie et moi on s’est disputé
parce que je voulais pas prêter un jouet à Petit Curieux.
Elle m’a dit que si je continuais comme ça, à refuser de partager,
je risquais de me retrouver tout seul pour jouer
et que ça me rendrait triste.
« Je suis jamais triste, moi, je m’en fiche des autres !
Je suis un garçon ! »,
je lui ai répondu en criant.
Et là, je l’ai vue devenir toute bizarre, Maman Chérie.
Elle s’est assise par terre et a ouvert ses bras
pour me faire venir vers elle.
Elle m’a dit que tout le monde, un jour ou l’autre,
a le droit d’être triste
ou d’avoir peur ; que ça s’appelle les émotions
et que c’est normal.
J’ai insisté en répétant que des émotions, moi,
j’en avais pas,
parce que je suis un garçon et qu’un garçon, c’est fort.
Encore plus fort quand c’est un garçon grand frère,
qui doit protéger son petit frère…
Et là, Maman Chérie s’est rendue compte qu’avec Papa Poule,
ils m’en demandaient sûrement beaucoup.
Beaucoup plus que ce qu’ils devraient normalement
demander à un petit garçon de 3 ans et demi.
C’est vrai que les « C’est un bébé, lui, prête lui ton livre,
tu es un grand toi ! »,
les « Arrête de pleurer aussi fort, tu vas réveiller ton frère »
et les « Dis pas de bêtises, les monstres, ça existe pas !
Si tu continues à crier, tu vas faire peur à ton frère »
sont courants à la maison.
Ils pensent pas à mal Papa Poule et Maman Chérie
quand ils disent ça, mais le résultat, c’est que je peux te dire
que c’est bien ancré en moi.
J’ai bien compris que quand on est le grand frère,
on a pas le droit d’avoir peur des monstres
ou des fantômes qui existent pas,
on a pas le droit de pleurer fort quand on a fait un cauchemar
ou qu’on est tombé par terre,
on a pas le droit d’avoir des larmes qui coulent
parce qu’on a perdu son doudou…
Quand on est un grand frère,
on doit tout faire pour que son petit frère soit bien
et pleure pas trop fort,
pour que Maman Chérie se mette pas à crier.
On doit faire comme si on était pas triste
ou énervé par ce qui se passe.
Et t’inquiète pas, à force de faire « comme si »,
on finit par presque y arriver.
On dirait presqu’on est plus triste ou plus énervé….
Mais il paraît que c’est pas bien.
Maman Chérie s’est excusée fort de tout ça.
Elle m’a dit qu’avec Papa Poule,
ils auraient pas du me dire aussi souvent
de refouler mes larmes ou de garder ma colère à l'intérieur de moi.
La colère, la tristesse, la frustration,
c'est des émotions normales,
surtout pour un petit garçon !
Maman Chérie a ressassé cette histoire
pendant plusieurs jours.
Et par hasard, hier, elle est tombée sur cette vidéo
de Camille Griselin, qui raconte l'histoire d'une petite fille, Fanny,
à qui on demande tout le temps
de mettre ses émotions dans sa poche...
Elle a pas le droit d'être triste ou en colère,
ni d'être jalouse, ni même de rigoler.
Bref, c'est pas facile pour elle d'avancer
avec toutes ces émotions cachées dans sa poche !
Et là, Maman Chérie s'est dit Bingo,
c'est exactement ce qu'il nous faut...
Alors si ça peut t'aider, toi aussi, à y voir plus clair dans tes émotions,
je te la partage avec grand plaisir.
Parce que même si je continue à hausser les épaules
en répétant que moi, je suis jamais triste,
Maman Chérie voit bien que j'écoute
avec attention ce conte chaque fois qu'elle me le met !
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